Le silence
- Gabe

- 12 déc. 2023
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Nous nous sommes soûlées de poésie,
nous en avons bu tous les mots :
à cause de nous le langage-même a disparu.
Dans des silences de salles désertes,
au bord de lacs gelés et sur les terrasses des cafés,
on entendait tout le raffut des vrombissements des moteurs
et des rues en travaux,
les vagissements des bébés et les raclements des gorges, les
sifflements des bourrasques, ceux des théières,
des loriots – nous nous sommes regardées silencieusement
la musique emplissait l’air autour de nos gestes muets
si les gens se mettaient à pleurer, ce n’était pas nous
s’iels se mettaient à penser la situation comme irrémédiable,
à écrire à leurs proches, affolé·es, à faire pencher leurs têtes
aux fenêtres et sur les balcons, ce n’était pas nous
j’ai écouté ton cœur battre de plaisir et de peur au milieu de leurs pas,
un sourire timoré éclairant ton visage – tu as signé
Je t’aime
et dans l’infinie douceur de notre embrassade
nous avons attendu le même dégrisement lent
des lendemains de fêtes, des
joies secrètes qui s’estompent
mais qui restent.